UN VIE NE SUFFIRA PAS
Nous ne sommes pas grand-chose, ni dans le
temps ni dans l’espace. Pourtant nous nous donnons individuellement beaucoup
d’importance. Quand la pensée se projette dans ce grand vide universel, nous
nous noyons dans l’insignifiant.
Même les grands « Hommes » de ce
monde ne sont finalement pas grand-chose. Et pourtant nous nous confondons dans
notre égo à vouloir être quelqu’un, à vouloir laisser une trace dans ce cycle
de vie.
Parfois, nous y arrivons. Certaines personnes
sont historiques, quel que soit leur catégorie, des sages inspirés, des élus
religieux, des artistes éphémères ou des hommes d’état célèbres. Jadis admirés,
puis disparus et dont on s’inspire dans notre quotidien. Cette petite mélodie
que l’on sifflote ou cette pensée d’Aristote.
Mais le temps fait son œuvre, et effaçant le
vivant il n’en laisse que des traces.
On suit ces traces, un moment transformant par
mimétisme celui qui les a faites.
On prône l’esprit du défunt, ou du gourou
toujours vivant surfant sur sa vision du monde et l’imposant à celles et ceux
qui en ont besoin.
Puis on y met notre propre ego, notre vision,
et on adapte selon pour s’en approprier l’essence même qui en faisait sa
pureté.
L’Homme n’est pas parfait par nature, il tend à
s’en approcher. Ce n’est pas un défaut, le « wabi-sabi » pratique
japonaise dérivée du taoïsme est assurément l’expression la plus parfaite de
cet équilibre du perfectible dans l’imperfection.
L’Ego pourrait-il être un outil de
perfectionnement de son être ?
Le croire serait une profonde erreur, mais le
passage est utile, voir nécessaire.
La crise de l’égo démarre à l’adolescence, pas
avant. Un enfant n’est pas dans l’égo, il est lui simplement. Il prend
conscience progressivement de ce qu’il est avant de comprendre qui il est.
Le développement perversif de l’égo est le
monde qui entoure l’enfant. L’influence de l’adulte, de la structure sociale
individualiste entraîne l’enfant dans une surinterprétation de ce qu’il n’est
pas. Le 21ème siècle a créé des enfants stars surexposés et son lot
de déviances sociales et sexuelles.
Le bien-être de l’enfant doit passer pas l’expression
de ce qu’il est et non de ce que les structures familiales et sociétales
souhaitent qu’il soit.
Les psychologues pour beaucoup sont dans l’incapacité
de restructurer une personne dès lors que le chaos égocentré est inscrit depuis
la naissance. Certaines pratiques sont allées jusqu’à tenter de « rebooter »
les terminaisons cérébrales par des méthodes peu orthodoxes et dangereuses.
Les crises d’identité de genre sont-elles de
cet ordre ? La question est posée, car si rien n’interdit à une personne
de s’affilier à un genre différent, est-il sensé de penser que la chirurgie transgressive et la
chimie à vie sont une réponse ? Ne confondons nous pas l’expression de l’être
avec celui de l’égo ?
Nous ne sommes pas grand-chose, un assemblage de grains de sable qui sépare la terre de l’eau. Nous avons comme chaque grain de sable une utilité vaste dont nous ne percevons pas l’importance. La plage dans ce cas est la finalité. Et cette plage signe la fin de la mer ou l’océan, régule un microcosme d’importance, et offre même le repos pour celui qui s’y repose. Les grains de sable s'ils étaient doués de conscience, voudraient ils prendre une autre place que celle qu'ils occupent? Au risque de transformer irrémédiablement le monde qui les entoure, invasion des eaux, destruction de l'écosystème en place ? leur propre destruction ? mais ont-ils simplement conscience de cela ?
Une vie de suffira pas à comprendre que nous ne
sommes qu’une poussière du macrocosme et un univers du microcosme. Mais si nous
prenons déjà conscience de cette réalité dans ce cycle d’existence, nous pourrions
vivre cette vie avec l’impression d’être plus en phase avec ce monde qui nous
entoure. Rien n’est le fruit du hasard, et quelle que soit la dimension dans
laquelle nous gravitons, la construction et l’organisation sont le fruit d’un
équilibre conscientisé. La nature est consciente, l’univers est conscient,
notre corps est conscient, rien n’est chaotique. Cela le devient lorsqu’il y a
déséquilibre. La médecine traditionnelle chinoise l’exprime parfaitement. Le
problème de l’être humain c’est que dans son comportement il en oublie ces règles d'équilibre et d'harmonie qui le régissent naturellement.
L’humain est son propre chaos. Il est dit dans
les écritures que « Dieu laissa le libre arbitre aux Hommes ». Était-ce
une erreur ? La réponse est dans la question : « Qui est Dieu ? »
ou se convaincre de l’existence ou non d’un être supérieur qui aurait les mêmes
caractéristiques que sa créature.
Dieu est Ego dans les écrits religieux, il est
jaloux, il est orgueilleux, mais il peut pardonner aussi. Il est visiblement un
peu trop « humain ».
Le bouddhisme est peut-être la philosophie spirituelle
la moins égocentrée, nonobstant le fait que Jésus de Nazareth était lui aussi
plutôt détaché de l’Ego Humain. L’Homme est-il chaotique ? Ou est-ce l’égo
qui est source de chaos ?
Le monde moderne et les réseaux de
communication multiplient « l’égo-trip » humain, et chacun n’a de
cesse que d’être unique, alors que nous devrions être plus "multiples". Nous avons en nous un immense pouvoir d'harmonisation collective, la possibilité de dépasser la matérialité qui nous divise. Nous n'avons jamais été aussi prêt d'une évolution spirituelle d'ampleur...Et pourtant nous vivons
certainement une des plus graves crises sociale et spirituelle que l’humanité ait connue depuis son origine : la destruction des fondements émotionnels qui font que nous évoluons. Ce qui est paradoxal, c’est que dans cette crise identitaire
et égocentrique nous exprimons un manque, une absence. Il serait amusant de
croire que ce soit de redevenir un grain de sable, finalement.
Une vie ne suffira pas…
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